
Comment la Créativité m’a sauvée!
Je dis souvent que c’est la créativité qui m’a sauvé. C’est elle qui m’a permis de cheminer et c’est grâce à elle que « de fil en aiguille », j’en suis arrivée à l’ART-THERAPIE.

Un modèle d’Expression Artistique

Toute ma vie, j’ai tricoté. J’avais 8 ans, lorsque j’ai pu m’ initié en regardant durant des heures mon arrière grand-mère à la manipulation des aiguilles à tricoter (mais pas que…). Le tricot ou tout autre travail d’aiguilles étaient une institution pour cette femme avec laquelle j’ai grandi.
C’était un moyen d’expression, mais aussi un moyen de reconnaissance pour elle. Elle avait sa place dans sa famille avec les nombreux ouvrages qu’elles faisaient pour les siens. Douée et créative, capable de reproduire sans modèle, un pull, un châle, une technique de tricot, de crochet. Elle jouait avec les couleurs des laines lorsqu’elle crochetait les grannies pour les housses de coussins des années 70. Elle m’impressionnait et j’admirais son travail.
Dès que j’ai pu, je tricotais, je cousais les vêtements de mes poupées Tressy. Les personnes qui tenaient des aiguilles m’attiraient, comme un aimant. J’ai appris la broderie grâce à la soeur de ma grand-mère. La couture avec une « grande » de l’immeuble que nous habitions alors. Ensemble nous cousions assises sur les marches des escaliers de l’immeuble. A l’extérieur, l’été et l’hiver, dans la cage d’escaliers. Plus tard, j’ai réalisé ma première jupe lors d’un atelier manuel au collège où j’étais. Je voulais apprendre la couture. Ma grand-mère a toujours refusé. Alors faute de pouvoir faire un métier de la couture, j’en ai fait une passion qui m’a conduit à l’ART-THERAPIE
Au départ, il y eut la Laine comme Médium

Du plus loin que remontent mes souvenirs, j’ai toujours connu la chaleur de la laine dans mes vêtements d’hiver. Pourtant je ne suis pas d’une génération qui a vécu avec elle par souci d’économie. Je suis née en 1961 et nous étions encore dans la période des 30 glorieuses. Jusqu’en 1973, premier choc pétrolier, notre pays n’a pas trop souffert de problème économique.
Seulement, voilà !!!…J’ai vécu jusqu’à l’âge de 6 ans avec mes parents et ma fratrie. Puis ma grand-mère m’a élevé jusqu’à ma majorité. . Ma grand-mère était économe dans une école de la ville; inutile de vous dire que rien que le métier de ma grand-mère en dit long sur la philosophie globale de cette femme qui m’a aimé, choyé, éduqué. D’ailleurs, une de ses expressions favorite était littéralement : « C’est pas Versailles, ici !!! » Par mimétisme j’ai transmis la même phrase à mes propres filles qui ont aujourd’hui, 35 ans et 31 ans. 2022 n’a pas tout inventé !!!
Ma grand-mère s’appelait Clémentine. Mon arrière grand-mère s’appelait Angèle. Ces deux femmes extraordinaires qui m’ont élevé avaient une relation particulière entre elles. Faite de reproches, de critiques de la part de Clémentine vis à vis d’ Angèle sur un leur passé familial compliqué. Angèle subissait souvent les reproches et la colère de sa fille et aujourd’hui, je comprends que ces deux femmes s’aimaient d’une manière particulière. Mais au delà de ce problème complexe intra-familial, j’avais la vie protégée d’une petite fille aimée par Clémentine et Angèle. J’étais la priorité dans la vie de cette femme de devoir qu’était Clémentine et je lui dois tellement que mon amour pour elle n’a pas de limite.
Durant 7 mois de l’année, lorsque Angèle vivait avec nous, elle tricotait, lisait les romans de Barbara CARTLAND aussi et s’occupait de faire les repas. Tout en s’occupant des tâches ménagères. Lorsqu’elle prenait son ouvrage en mains, je me souviens de son visage qui changeait. Au bout de quelques minutes, celui-ci se détendait et un sourire apparaissait. Elle regardait son ouvrage avec plaisir et bienveillance et elle se mettait à me fredonner des chansons ou à me conter une histoire, pendant que moi je dessinais des princesses avec des robes magnifiques, assise à côté d’elle. Le temps se suspendait alors. La maisonnée était calme, en paix et je me sentais en sécurité.
Donc, Angèle tricotait et tricotait et crochetait. Tout son entourage bénéficiait de son travail magnifique d’aiguilles. L’hiver, j’étais bien au chaud avec les pulls qu’elle me tricotait et que mon entourage admirait. Car mine de rien, j’avais un succès fou avec la qualité de la laine et les modèles, bien à la mode de Phildar, Le Chat Botté, Pingouin…
Je me souviens ne jamais avoir souffert du froid, ni à l’extérieur, ni à l’intérieur du logement de Clèmentine. Mais « j’étais bien couverte » (une autre expression qui a jalonnait ma vie). Le logement de ma grand-mère était chauffé à 19° et nous avions un thermomètre pendu dans la cuisine. Ma mission était de vérifier 2 fois par jour la température affichée…).
Seule la salle de bain, bénéficiait d’un chauffage d’appoint en supplément (c’était un Thermor) et les serviettes étaient chaudes et au sec en permanence. Lorsqu’elles étaient mouillées, elles séchaient suspendues au dessus du chauffage comme le linge en général. Alors, certes, c’était pas très décoratif mais ça avait l’avantage d’être efficace et le linge ne sentait jamais mauvais, car l’appartement était ventilé plusieurs fois par jour grâce à l’ouverture des fenêtres.
Cette notion de bien-être avec la fibre va me poursuivre durant des dizaines d’années pour s’imposer à moi lors de mon DU en INTERRACTION ENTRE L’ART & LA PSYCHOTHERAPIE. C’est là que j’ai découvert l’ART-THERAPIE.
Conclusion

Aujourd’hui je me félicite d’avoir pu développer et garder intacte cette passion familiale en moi et d’avoir fait d’elle un de mes moyens de survie. J’ai eu la chance d’avoir pu transformer ce moyen de survie en passion. Lequel m’a permis de trouver le lien d’un sens vers l’expression artistique. En pouvant m’exprimer à travers la laine & la fibre en général, j’ai réussi (inconsciemment au départ) à ne pas sombrer complétement lors d’épisodes sensibles de ma vie.
J’ai traversé des épreuves personnelles et des accidents de vie mais aussi la maladie en gardant cette part de moi tournée vers l’expression à travers la matière textile et le travail d’aiguilles.
Couplé à mon activité artistique, j’ai suivi un cheminement d’aide puis de soutien psychologique durant des décennies. Aujourd’hui encore, je poursuis les deux, consciente que j’ai là mes deux béquilles pour avancer dans ma vie. Je ne dirais pas que l’une seule de ces deux béquilles est plus importantes que l’autre, pour moi. Je dirais qu’elles sont complémentaires. J’y vois là, le véritable sens du mot ART-THERAPIE.
Complémentaires au point que j’ai décidé d’en faire un métier. Il m’a été nécessaire à un moment donné de comprendre « quel processus entre la pratique artistique et la psychologie pouvait être le moyen de résilience et de stabilisation dans mon cas ? ». Pour ce faire, je me suis donnée les moyens de reprendre des études universitaires à 58 ans et aujourd’hui, j’ai « Ma Réponse » à cette question. C’est là l’essentiel de ma quête, de mon travail sur moi même (avec le soutien de professionnels exceptionnels qui m’ont appuyé, encouragé et aidé…).
Mais ça c’est une longue histoire…